Pour les touristes qui visitent le tombeau de Napoléon aux Invalides à Paris, il semble la chose la plus naturelle du monde qu’il soit enterré là. Le souverain le plus célèbre de France repose en état au cœur de sa nation.
Cependant, ce n’est pas le premier endroit où Napoléon a été enterré. Ce n’est qu’au prix d’énormes efforts – physiques, organisationnels et diplomatiques – que le défunt empereur des Français est venu se faire enterrer dans la nation qu’il aimait.
Ce que Napoléon voulait
Napoléon Bonaparte est mort en 1821, exilé sur l’île de Sainte-Hélène appartenant à la Grande-Bretagne. Sa vie là-bas, bien que relativement luxueuse par rapport à la plupart des gens de l’époque, était sans aucun doute une forme d’emprisonnement. Les Britanniques, craignant qu’il ne revienne au pouvoir et à la conquête ne le laisseront jamais quitter l’île.
Dans son testament, Napoléon a demandé que ses cendres soient enterrées « sur les bords de la Seine, entouré du peuple français que j’aime tant. » Il avait également envisagé une inhumation en Corse, où il avait grandi. Surtout, il était concentré sur une chose : que les Britanniques ne l’enterrent pas à Londres et tirent un capital politique de sa mort.
Sainte-Hélène
Ce que Napoléon voulait et ce qu’il a obtenu n’était plus la même chose. Méfiants à l’idée de créer un sanctuaire à l’empereur qui avait défié leur domination, les Britanniques ne permettraient pas que sa dépouille retourne en France.
Au lieu de cela, le corps de Napoléon a été enterré dans une petite vallée de Sainte-Hélène, sous deux grandes pierres plates et à l’ombre d’une paire de saules. Même l’inscription sur sa tombe a été la cause d’une dispute. Les Français insistaient pour qu’elle dise simplement « Napoléon » tandis que les Britanniques voulaient son nom complet, « Napoléon Bonaparte », pour s’éloigner de son imagerie impériale.
La monarchie de Juillet
Les événements qui ont conduit à la ré-inhumation de Napoléon ont commencé en 1830. Une révolution a une fois de plus renversé la monarchie française des Bourbons, qui avait été restaurée à la chute de Napoléon en 1814 et à nouveau après son bref retour en 1815.
À la place des Bourbons, les Français ont couronné le roi Louis-Philippe, un membre de la famille royale élargie, mais qui n’était pas un proche successeur pour la couronne. Son règne était plus conciliant que celui des Bourbons, colérique et réactionnaire, mais il avait des problèmes. Il n’est ni l’héritier légitime du trône ni la voix élue du peuple. Il avait besoin de moyens pour renforcer la légitimité de son règne.
L’affection pour Napoléon Bonaparte et son héritage restait élevée en France. En cherchant à rendre le corps de Napoléon, Louis-Philippe a tenté de se lier à cet héritage. Il veut être vu publiquement comme l’homme qui a ramené l’Empereur bien-aimé. Il voulait rappeler au peuple ce qu’un monarque issu de la révolution pouvait accomplir.
Diplomatie avec la Grande-Bretagne
Pour ce faire, Louis-Phillippe avait besoin de la coopération des Britanniques. François Guizot, l’ambassadeur à Londres et un politicien habile qui sera plus tard Premier ministre, fut chargé d’y parvenir. Il transmet la demande de Louis-Philippe pour le retour de la dépouille de Napoléon comme une requête d’un monarque à un autre. Plaidant pour des raisons humanitaires, il demanda que les restes soient rendus pour le bien de ceux qui avaient servi sous Napoléon.
C’était une excellente idée, mais ce qui a fait la différence, c’est la politique. Une crise avait éclaté en Syrie, avec la Grande-Bretagne et la France dans des camps opposés. Lord Palmerston a accédé à la demande des Français dans l’espoir de s’attirer leurs faveurs et de les distraire de la question syrienne.
Où enterrer Napoléon ?
Les préparatifs ont été nombreux pour organiser le retour de Napoléon dans sa patrie. Cela incluait la décision de savoir où l’enterrer. Plusieurs options ont été envisagées, notamment l’Arc de Triomphe et la basilique de Saint-Denis.
Louis-Phillippe s’est contenté de l’église de l’Hôtel des Invalides. Cet ensemble de bâtiments du XVIIe siècle était l’un des plus grands et des plus prestigieux de Paris. Construit pour prendre soin des vétérans militaires, c’était le choix symbolique parfait, rappelant à toute la France que Napoléon avait partagé le danger et le sacrifice avec ses soldats, et qu’il avait pris soin d’eux quand ils avaient besoin de lui.
Louis Visconti a été chargé de construire un monument approprié aux Invalides pour commémorer l’Empereur.
Exhumation
Les préparatifs étant achevés, le moment était venu de récupérer le corps de Napoléon. A l’automne 1840, le prince de Joinville, fils de Louis-Philippe, est envoyé à Sainte-Hélène avec deux navires militaires et 500 hommes, dont deux anciens maréchaux de Napoléon.
Au milieu de solennités et de cérémonies, l’exhumation commence. Creusant la nuit lorsque l’air est plus frais, les Français déterrent Napoléon. Le chirurgien du navire Rémi-Julien Guillard a supervisé le processus et a confirmé que le corps était conforme aux attentes.
Le voyage de retour
Les restes de Napoléon et les artefacts avec lesquels il avait été enterré ont été sécurisés dans six cercueils et cercueils. La frégate Belle-Poule les transporta pour le voyage de six semaines vers la France.
Arrivant à Cherbourg, ils y restèrent une semaine. Plus de 100 000 personnes sont venues rendre hommage à leur Empereur pendant qu’il reposait là.
Un bateau à vapeur, le Normandie, a transporté le corps depuis Cherbourg, accompagné d’une flottille de bateaux fluviaux. Partout où ils passent, les gens s’alignent sur la Seine pour voir passer la dépouille de Napoléon.
Pompes, cérémonies et internement
Enfin, la dépouille de Napoléon atteint Paris pour des funérailles grandioses. Des foules immenses bordent les routes le long desquelles une péniche puis un carrosse transportent ses cendres à travers la ville. Des aigles impériaux et des statues de la Victoire ailée bordent les routes. Une statue de bronze de Napoléon lui-même assistait à son retour.
Enfin, aux Invalides, Joinville a remis les cendres de Napoléon avec une grande solennité à son père, le roi. Au son de la Messe des morts de Mozart, Napoléon est enterré.
Ce jour est marqué par une joie générale et une solennité religieuse. Le plus grand héros de la France était revenu à la nation dans la mort. C’était le moment de célébrer sa grandeur et de pleurer sa perte.
Napoléon était rentré au pays.