Cher éditeur:
L’eczéma du mamelon, considéré la plupart du temps comme une manifestation mineure de la dermatite atopique, peut avoir des causes inconnues. Cependant, son évolution et son profil clinique rendent souvent difficile la différenciation de ses causes sous-jacentes telles que l’irritation ou la sensibilisation. Néanmoins, la dermatite de contact allergique doit être considérée comme une cause importante de l’eczéma du mamelon.
Dans la présente étude, nous avons analysé les résultats des tests épicutanés de patients atteints d’eczéma du mamelon en utilisant la série standard coréenne comprenant 25 antigènes (Chemotechnique Diagnostics, Malmo, Suède). Les antigènes ont été soigneusement ajoutés dans une chambre IQ Ultra® (Chemotechnique Diagnostics) qui est faite de mousse plastique de polyéthylène sans additif avec un papier filtre incorporé, et collés sur le dos des patients. Les résultats ont été enregistrés 30 minutes après le retrait du patch (comme d’habitude), et les patients ont été réévalués 48 heures plus tard. Sur la base des recommandations du Groupe international de recherche sur la dermatite de contact, une lecture de +1 (patients présentant des papules érythémateuses et un œdème mais sans aucune vésicule) ou plus a été considérée comme une réponse positive.
Parmi un total de 12 patients (toutes des femmes) qui ont été soumis à un test épicutané, 5 ont été clairement diagnostiqués comme souffrant de dermatite atopique sur la base de leurs antécédents médicaux et des résultats de leur examen physique. Neuf patients ont présenté une réponse positive à plus d’un antigène. Sur 5 patients ayant des antécédents de dermatite atopique, 4 patients (80 %) ont présenté une réponse positive. Les antigènes présentant une fréquence élevée de réponses positives étaient, par ordre décroissant de fréquence, le Cl+Me-isothiazolinone, le chlorure de cobalt, le thimérosal, le sulfate de nickel et la résine 4-tert-butylphénol-formaldéhyde (tableau 1).
Tableau 1
Résultats des tests de patchs pour 12 patients atteints d’eczéma du mamelon
Les valeurs sont présentées en nombre (%).
Sur les 9 patients qui ont eu des réponses positives au test épicutané, 7 (77,78 %) avaient une distribution bilatérale des lésions, et 8 patients (88,89 %) présentaient une propagation des lésions sur la peau périaréolaire. En ce qui concerne l’évolution de l’eczéma, 8 patients (88,89 %) présentaient des lésions aiguës. Cependant, 3 patientes dont les réponses au test épicutané étaient négatives ne présentaient que des lésions unilatérales, limitées au mamelon et à l’aréole plutôt qu’à la peau périaréolaire. Il existait donc une différence significative en ce qui concerne la zone concernée et la distribution des lésions (p<0,05) (tableau 2).
Tableau 2
Caractéristiques cliniques de l’eczéma du mamelon selon la distribution des lésions et les antécédents où la réaction positive au test épicutané indiquait une dermatite de contact allergique
Les valeurs sont présentées en nombre (%). Le logiciel *Statistical Package for Social Sciences (SPSS ver.15.0 ; SPSS Inc., Chicago, IL, USA) a été utilisé pour l’analyse des données. Les données catégorielles ont été comparées à l’aide du test exact de Fisher. Les différences statistiquement significatives sont indiquées par des valeurs p <0,05.
Neuf patients ayant un test épicutané positif ont été conseillés d’éviter l’utilisation de produits contenant les antigènes positifs, après quoi cinq patients (56%) ont présenté une récurrence réduite de l’eczéma du mamelon.
L’eczéma du mamelon est un résultat dermatologique mineur caractéristique indiquant une dermatite atopique1. Néanmoins, des cas dans lesquels l’eczéma du mamelon n’était pas un résultat caractéristique de la dermatite atopique ont été rapportés2,3. Si l’eczéma du mamelon ne s’améliore pas après le traitement conventionnel de la dermatite atopique, ou si les symptômes actifs de l’eczéma, tels que l’érythème sévère et l’exsudation, sont limités aux zones fréquemment touchées par la dermatite atopique, la dermatite de contact allergique doit toujours être envisagée en premier lieu. Dans cette étude, des tests épicutanés positifs aux antigènes ≥1 ont été trouvés chez 9 des 12 patients (75%). Selon une enquête épidémiologique menée par le groupe coréen de recherche sur la dermatite de contact, le Cl+Me-isothiazolinone n’est pas considéré comme un antigène fréquent ; cependant, dans la présente étude, cet antigène a provoqué des réponses positives aussi fréquemment que les ions métalliques. Le Cl+Me-isothiazolinone est couramment présent dans les conservateurs, les détergents et les assouplissants ; par conséquent, des quantités infimes restant dans les sous-vêtements après le lavage ou dans les produits de soins personnels peuvent agir comme des antigènes. Le contact répété, même au seuil subclinique, et une faible fonction de barrière dans la peau affectée par la dermatite atopique peuvent contribuer au développement de la sensibilisation de contact. Pour prévenir les dermatites de contact chroniques récurrentes, les antigènes responsables doivent être identifiés par un dépistage au moyen de séries de tests épicutanés, et un programme d’apprentissage de l’évitement doit être suivi4.
Nous avons constaté des améliorations cliniques considérables et une réduction des récidives chez 5 des 9 patients qui avaient des tests épicutanés positifs et qui ont suivi un programme d’apprentissage de l’évitement. En conclusion, la dermatite de contact allergique doit être considérée en premier lieu dans le diagnostic différentiel de l’eczéma du mamelon, en particulier chez les patientes présentant des lésions bilatérales et des lésions s’étendant à la peau péri-aréolaire.
L’eczéma du mamelon est une affection qui peut être traitée par des tests épicutanés.